A Review from the STUDY and RESEARCH CENTER for INITIAL BIPEDALISM
Pour tout renseignement complémentaire, vous pouvez contacter :
M. François de Sarre,
par e-mail
( septembre 1990 )
Sommaire :
Essai sur le statut Phylogénique des Hominoïdes Fossiles et récents :
le point de vue de la Théorie de la BIPEDIE INITIALE ( 1ère partie ),
par François de SARRE
L'Homme, vertébré ancestral ( 2ème partie ),
par François de SARRE
Charles FORT and INITIAL BIPEDALISM,
by Ulrich MAGIN
par François de SARRE
Summary : If man has remained morphologically and anatomically more or less the same throughout the course
of the last geological ages, different groups of hominoids have followed their own evolution, progressing parallel to man
and at the same time branching out. The Initial Bipedalism Theory allows us to argue that the different types of fossil-known
hominoids ( commonly accepted as the links binding the Homo sapiens to his presumed simian ancestors )
and of still-living hominoids ( like the yeti or the sasquatch ) appear to be rather vestiges of man's lineage.
The Australopithecines, for instance, have kept ( as the fossils show ) a 'relic' bipedalism, developed once from man,
and evolved towards a stage of anthropomorphic ape. As fossilization is a highly unusual process, paleontological data will
be always incomplete. It explains the fact that ancient traces of man's activity on earth have not been found
until today ( or not recognized ! ). On the other hand, the survival until present time of remote hominoids
throughout the world is not admitted by classical anthropology, although this possibility should be considered open.
A series of deductions leads us to the suggestion that the present situation in the Primates' distribution ( including man,
hidden hominoids, apes, monkeys ) is the same as in past geological times.
INTRODUCTION
Il est apparu intéressant ici de faire un parallèle entre les Hominoïdes non-sapiens anciens,
connus à l'état de fossiles, et ceux toujours vivants, méconnus, voire totalement ignorés de l'Anthropologie 'classique',
qui sont sans doute encore disséminés aujourd'hui en quelques points du globe, dans des massifs montagneux boisés
ou à l'intérieur de grandes forêts inexplorées.
En 1952, le zoologue Bernard HEUVELMANS a été le premier à faire le rapprochement
entre le Yéti népalais ( qu'il décrivit un peu plus tard, en 1958, sous le nom scientifique
de Dinanthropoïdes nivalis ) et le Gigantopithèque fossile, qui vivait déjà voici près de 10 millions
d'années, mais dont on a découvert au Vietnam des restes montrant que l'espèce a pu survivre jusqu'à une période relativement
récente ( 400.000 ans ). Il était alors tentant de penser que le Gigantopithèque ne s'était pas éteint,
mais qu'il s'était réfugié vers les sommets, dans l'Himalaya, où il pourrait encore survivre sous les traits du Yéti.
Le Sasquatch ( ou 'Bigfoot' ) américain a été désigné aussi comme le
descendant possible d'un Gigantopithèque du Plio-Pléistocène ( HEUVELMANS 1986, KRANTZ 1987 ).
Un autre auteur, Ivan SANDERSON, avait tenté dès 1961 de mettre en place et d'intégrer les
divers Hominoïdes 'reliques' dans un vaste tableau représentant l'arbre généalogique de l'Homme, avec tous ses ancêtres
supposés, ainsi que les Pongidés récents ou fossiles. Cette étude, digne de mérite, apparaissait cependant comme
une tentative quelque peu 'forcée' de faire coïncider les documents fossiles et la représentation que nous avons,
grâce aux divers rapports de témoins oculaires, de l'aspect physique des Hominoïdes Sauvages et Velus
qui vivent apparemment de nos jours en différents points de la planète.
Mon opinion personnelle, que je vais développer tout au long de cet article
[ en 2 parties ], est qu'il paraît nécessaire, dans le cadre d'une étude rationnelle sur les relations
susceptibles d'exister entre les Hominoïdes fossiles et les formes récentes à aspect semblable,
de se démarquer de la tendance prédominante en Anthropologie, qui consiste à faire descendre systématiquement
une espèce plus jeune d'une autre, géologiquement plus ancienne. La 'continuité' peut n'être qu'apparente !
Et dans ce cas, la ressemblance résulterait d'une convergence des formes.
La théorie de la bipédie initiale admet l'émergence successive [ et espacée
dans le temps ] de créatures hominoïdes diverses, par bifurcation à partir de la lignée humaine ancestrale
[ à partir du 'stock' humain de type sapiens ]. Ces formes, adaptées à des environnements similaires,
peuvent se ressembler morphologiquement et anatomiquement. Elles sont, si l'on veut 'cousines', mais ne
procèdent nullement par filiation l'une de l'autre, comme on a peut-être trop tendance à penser.
Ainsi, même la tentative, très louable en soi, d'un chercheur de terrain comme l'anthropologue
américain Grover S. KRANTZ, de vouloir expliquer la présence actuelle du Sasquatch en le replaçant dans la continuité
évolutive du Gigantopithèque, me paraît tenir du même état d'esprit que les considérations passées - et vite
dépassées - des paléontologues du siècle passé qui faisaient provenir, sur la base de simples ressemblances,
le Gorille d'un Singe du Tertiaire comme le Proconsul major, et le Chimpanzé du Proconsul africanus…
La théorie de la bipédie initiale me paraît, à ce point de vue, un excellent outil de travail.
Pour cela, partons sans préjugés de l'évidence biologique que l'Homme sous sa forme actuelle
( Homo sapiens ), loin d'être d'apparition récente [ dans les 200.000 ans, vous diront maintenant la
plupart des spécialistes, alors qu'il n'y a guère on s'accordait plutôt sur 35.000 ans et quelques… ], représente
un morphotype ancien : en fait, c'est l'Homo sapiens qui est resté le plus proche de l'archétype
des Primates !
Au fur et à mesure, des créatures nouvelles [ australopithèques, grands singes, singes à
queue ], morphologiquement assez voisines [ surtout si elles vivent dans un même environnement :
celui de la forêt tropicale ], ont pu apparaître par déshominisation progressive à des périodes différentes,
en divergeant anatomiquement de l'Homme dont elles sont issues. Ainsi, le Sasquatch [ décrit en 1986 par KRANTZ
sous le nom de Gigantanthropus canadiensis à partir d'une étude sur les empreintes ] a-t-il pu naître
sur le continent américain à une époque relativement récente [ géologiquement parlant ]. Il ne présenterait
ainsi que quelques traits de convergence avec le Gigantopithecus blacki, dont KRANTZ a étudié les restes fossiles.
Mais le Sasquatch n'en serait pas l'aboutissement évolutif à notre époque présente.
Dans cette première partie d'article [ la seconde partie paraissant dans
BIPEDIA-7 ], nous allons passer en revue quelques Singes anthropomorphes fossiles et récents,
ainsi que les fameux Australopithèques. Puis la seconde partie sera consacrée au problème des Hommes Sauvages et Velus,
des Néanderthaliens et des Pithécanthropes. Nous comparerons ainsi les formes anciennes et les formes possiblement actuelles.
Dans l'ensemble de sa démonstration, l'auteur voudrait partir d'un fait établi : à savoir qu'une
espèce d'Homme existe sur Terre ( c'est nous, l'Homo sapiens ) et qu'elle cohabite avec des
Primates arboricoles ( c'est-à-dire, les Singes, répartis en plusieurs groupes ) dont certains, les Anthropomorphes,
sont restés très proches anatomiquement et génétiquement de l'Homme. Les cryptozoologues et hominologues rajoutent à
ce tableau les Hominidés bipèdes non-sapiens [ nous avons mentionné le Sasquatch ] et des Grands Singes
anthropomorphes ( comme le Yéti ), non répertoriés dans les manuels de Zoologie, mais souvent déjà décrits
de manière scientifique. Le fait établi, évoqué quelques lignes plus haut, est illustré par la grande diversité
actuelle des Primates, allant de l'Homme à bipédie érigée et à gros cerveau, jusqu'aux Lémuriens et Tupaiidés,
qui sont quadrupèdes et ont acquis un crâne allongé, avec le 'museau' typique de la plupart des mammifères…
Entre l'Homme et les Grands Singes sans queue s'intercaleraient logiquement, en quelque sorte, les formes 'hominiennes'
que j'appellerai : hyperanthropoïdes et australopithécoïdes.
L'auteur part du modèle de la faune présente pour extrapoler dans ce sens qu'une situation semblable
caractérisait aussi les époques géologiques passées, depuis qu'il y a de grandes forêts sur Terre où des simiens peuvent
se déshominiser en adoptant des habitudes alimentaires et locomotrices nouvelles !
Certes, des restes humains ( ou les traces de l'activité de l'Homme, Homo sapiens )
n'ont pas été retrouvés [ ou n'ont pas été reconnus comme tels ] dans les strates sédimentaires anciennes
où l'on a déjà découvert les restes d'Hominoïdes simiens. C'est, bien sûr, imputable aux lacunes de la Paléontologie,
qui demeure une science de l'exception !
La Paléontologie donne néanmoins des indications fort utiles. Ainsi, les Australopithèques
de l'Afar [ ou bien des variétés voisines ] ont été fréquents en des lieux et à des époques données :
ces périodes de multiplication des formes australopithécoïdes correspondent vraisemblablement à des phases cycliques
de régression de l'espèce humaine proprement dite.
En tout cas, quelle que soit l'époque géologique concernée ( aussi loin que les fossiles
d'Hominoïdes nous permettent de remonter, voire au-delà ), il y a bien dû y avoir cohabitation, donc existence
simultanée, de tous les types possibles de Primates, au sein desquels : des bipèdes de type sapiens,
des Hyperanthropoïdes et des Australopithécoïde, ces derniers étant issues par déshominisation
de la souche humaine… Les hominiens vont profiter périodiquement, en quelque sorte, des régressions
et avatars de l'espèce humaine [ quelle qu'en fussent les causes ] pour se multiplier et pour repeupler
de vastes zones de la planète ! A ces occasions, il peut y avoir également l'émergence de formes déshominisées
nouvelles, par spécialisation et spéciation. Cela va contribuer à augmenter de façon conséquente la probabilité pour nos
paléontologues ( ! ) de retrouver leurs restes fossilisés, en des endroits comme la fameuse Rift Valley…
LES SINGES ANTHROPOMORPHES
Ce sont les Gibbons, Siamangs, Orang-Outans, Gorilles et Chimpanzés, en ce qui concerne
les formes connues actuelles. On y adjoint différentes lignées de Singes fossiles du Tertiaire, les plus anciens parmi
eux paraissant être Aegyptopithecus et Oligopithecus, avec près de 35 millions d'années. D'autres singes,
comme Propliopithecus, Proconsul, Dryopithecus et Ramapithecus ont été retrouvés dans
des sédiments plus récents.
Tous présentent, en plus de traits simiens généraux - et de ceux spécifiques
à leurs lignées -, d'indiscutables caractères anatomiques humains, préservés chaque fois de façon un peu différente…
La théorie de la bipédie initiale apporte ainsi une réponse censée concernant l'émergence successive de ces lignées
de simiens anthropomorphes en postulant qu'ils procèdent par déshominisation de la souche Homo originelle !
Le même phénomène évolutif s'est d'ailleurs reproduit tout récemment [ géologiquement
parlant ], voici quelques millions d'années à peine, dans le cas des Gorilles et des Chimpanzés contemporains.
Une forme fossile, Oreopithecus bambolii, menait, voici près de 10 millions d'années,
dans les forêts d'Europe, une vie analogue à celle des Gibbons contemporains. L'Oréopithèque, grand comme un chimpanzé,
était particulièrement riche en caractères humains, au point qu'un paléontologue suisse, le Dr J. HÜRZELER,
a été enclin de le considérer comme un Hominidé [ fort raccourcissement de la face, prémolaires molarisées comme
chez l'Homme, bassin large et court, pas très simien d'aspect ]. Le grand problème pour les paléontologues est
que l'Oréopithèque possèdait des bras immenses de brachiateurs [ il se déplaçait dans les arbres en
se suspendant de branche à branche ]. Cette structure composite ( en fait, un véritable paradoxe phylétique
pour les tenants d'une évolution allant du simien vers l'humain ) s'explique merveilleusement si l'on s'en réfère
à un bipédisme initial des Primates.
Le phénomène évolutif de la déshominisation se traduit, comme le note
B. HEUVELMANS ( 1974 ), par des transformations adaptatives au niveau du squelette, crânien en particulier,
et par une perte de conscience de l'identité humaine. Quel qu'en soit le facteur déclencheur, c'est l'évolution vers un stade
anatomique que l'on se doit de qualifier d'ultra-humain, c'est-à-dire qu'il se situe au-delà du point d'achèvement
anatomique de la forme humaine ( morphotype ). Il y a, bien sûr, une régression du psychisme.
A partir de la lignée originelle bipède à tête ronde de type Homo, dont nous procédons par filiation
directe ( et dont nous avons hérité les principales caractéristiques physiques et mentales ), se sont également
développés par déshominisation, au cours des périodes géologiques passées, de nombreux rameaux collatéraux.
Beaucoup de ces Primates n'ont eu qu'une existence très éphémère et ont disparu sans laisser de traces fossiles
ni de descendance jusqu'à notre époque contemporaine. Les formes fossiles connues représentent autant d'espèces
déshominisées, qui ne sont pas pour autant apparentées entre elles, sinon par leur origine commune à partir de la
souche Homo originelle ! Les morphologies voisines de bien des singes résultent d'un phénomène de convergence.
C'est ainsi que Chimpanzés et Gorilles se ''ressemblent''...!
Les Grands Singes africains actuels ont divergé de l'homme voici sans doute moins
de 5 millions d'années. Cela ressort de nombreuses études contemporaines [ citées dans SARRE 1989 ]
que Chimpanzés et Gorilles ont bifurqué à des dates séparées de la lignée commune ancestrale, et que le chimpanzé
est plus proche de l'homme que le gorille, à l'apparence pourtant voisine !
En fait, ce qui distingue génétiquement le chimpanzé de l'homme, c'est que le
chromosome 13 du premier possède un bon morceau de matériel génétique en plus ( 1% du
génome total ), et que le chromosome 2 de l'homme s'est scindé en deux chez le grand singe africain. Tous
ces traits évolués du Chimpanzé sont en relation directe avec l'adoption secondaire de la démarche quadrupède chez ce dernier,
liée à la pratique de l'arboricolisme. Bref, un chimpanzé sait faire un tas de choses que l'homme ne sait pas faire !
Les chimpanzés seraient-ils aussi les descendants en ligne directe de l'Australopithèque
des Afars ? Cette hypothèse est, pour le moins, séduisante, et expliquerait pourquoi on ne trouve pas, en Afrique,
d'ossements fossiles de ' pré-chimpanzés '... Mon point de vue serait néanmoins de généraliser cette assertion,
en postulant par exemple que le Chimpanzé procède bien de formes australopithécoïdes, sans doute contemporaines
de l'Australopithecus afarensis, mais que ce dernier a pu aussi s'éteindre dans son environnement de savane,
sans pour autant poursuivre son évolution amorcée vers le singe arboricole. Tous les cas de figure peuvent ici être envisagés,
sauf, bien sûr, celui qui prétendrait situer les Australopithèques dans l'ascendance de l'homme moderne !
Pour en revenir au phénomène évolutif de déshominisation, je conçois qu'un premier
stade [ correspondant, par exemple, à l'état anatomique d'un néandertalien paléanthrope ] puisse développer
des caractères ( projection de la face et des mâchoires vers l'avant, perte progressive de la rondeur originelle
du crâne ) qui vont peu à peu modifier l'architecture du squelette tout entier. Ces individus peuvent être
appelés hyperanthropoïdes [ c'est-à-dire, évoluant au-delà de l'homme ]. Des stades intermédiaires,
ressemblant par exemple à l' "Homo" habilis, mènent ensuite vers des formes australopithécoïdes,
capables elles-mêmes d'évoluer vers l'état pithécoïde [ avec perte progressive d'une bipédie
vraiment fonctionnelle ]. L'adaptation à l'arboricolisme se poursuit, pour peu qu'il y ait retrait définitif dans la forêt.
Mais d'autres options évolutives demeurent toujours possibles : elles furent à l'origine de nombreuses
autres lignées d'animaux mammaliens !
Des Grands Singes fossiles ou récents, comme Gigantopithecus,
Ouranopithecus ( dont on vient de retrouver une face presque complète en Grèce ),
le 'Yéti ' ( Dinanthropoïdes nivalis ) ou l'Ameranthropoïdes loysi, sont à replacer dans un tel
contexte évolutif. Le 'Yéti ', auquel fut consacré une étude magistrale dans le précédent numéro de Bipedia
( GRISON 1990 ), serait ainsi un Grand Singe anthropomorphe vivant essentiellement
dans les forêts quasi impénétrables de l'Himalaya, situées dans la zone 3000-4000 m, et contrairement à la réputation
qui lui a été faite ( 'abominable homme-des-neiges' ), il ne s'aventure guère sur les champs de neige
que pour se rendre d'une vallée à l'autre. Les liens de parenté qui unissent le 'Yéti ' aux deux espèces connues de
Gigantopithèques ( G. blacki et G. bilaspurensis ), à l'Ouranopithèque grec ou
au Sivapithèque indien [ et, par ce biais, sans doute à l'Orang-Outan ] paraissent indiscutables. Le 'Yéti ' peut
s'être aussi développé in loco dans les grandes forêts d'altitude himalayennes, et ce dans un passé relativement
récent [la comparaison de sa morphologie avec celle du Gorille, et son aptitude résiduelle à une bipédie plus marquée
que celle du Grand Singe africain, permettent d'évoquer une date de séparation plus récente : 2-3 millions
d'années ]. C'est tout du moins l'alternative théorique que je présente ici.
L'Ameranthropoïdes loysi, quant à lui, est connue par une photographie qui a été prise
en 1917 au Vénézuela par le géologue suisse François de LOYS. Ce singe, anthropomorphe d'aspect,
grand d'environ 1,5 m, a été désigné par ses détracteurs comme un vulgaire Atèle, auquel on aurait dissimulé la longue
queue sur la photo… Les similitudes entre le squelette des Platyrhiniens et celui de l'homme ont souvent été reconnues
troublantes par maints auteurs, dont le primatologue bien connu A.H. SCHULTZ. La théorie de la bipédie initiale
permet d'expliquer la maintenance de tant de caractères humains chez des Singes du Nouveau Monde…
caractères qui ne sont pas toujours présents chez les Catarhiniens. On devine aisément pourquoi un singe américain
d'allure anthropomorphe comme l'Améranthropoïde dérange. Comme l'écrit le Dr HEUVELMANS ( 1954 )
dans son fameux livre Sur la Piste des Bêtes Ignorées ( tome 2, p. 104 ) : "L'entêtement
avec lequel certains naturalistes se refusent à entériner l'existence de l'Améranthropoïde traduit chez eux une
peur inconsciente : celle de devoir réviser de fond en comble l'édifice sclérosé de leurs conceptions".
LES AUSTRALOPITHECOÏDES
Au début du XX° siècle, l'attention des paléoanthropologues s'était plutôt portée vers l'Asie, où l'on avait
exhumé les restes de l'Homme de Pékin, consécutivement à ceux de l'Homme de Java. Aussi, les Singes austraux
( ou Australopithèques ) mirent-ils quelque temps à s'imposer aux yeux des chercheurs. Depuis, on s'est habitué
à l'idée que le Continent noir avait été le berceau de l'Humanité [ si l'on s'en réfère aux conceptions courantes ! ].
Les Australopithèques sont des formes restées plutôt bipèdes, à cerveau assez bien
développé ( 500 cm3 environ ), compte tenu de leur petite taille habituelle ( 1 m
à 1,5 m ). Si, dans l'ensemble, leur dentition est humaine et indique un régime omnivore, certains
australopithèques tardifs [ ce qui ne veut pas dire que d'autres, auparavant, n'aient déjà présenté les
mêmes traits ! ] montrent une adaptation très nette à une alimentation coriace composée de racines,
de bulbes et de tubercules. Les Australopithèques possèdent souvent en commun avec les Panidés une tendance nette
vers un dimorphisme sexuel marqué [ présence de crêtes sagittales chez les mâles ].
Les théories communément élaborées à partir de l'échantillonnage actuel des fossiles
d'Hominoïdes en provenance d'Afrique orientale pèchent toutes par le même désir de vouloir assigner à ces formes,
soit le statut d'ancêtres directs de l'homme, soit celui de collatéraux à morphologie relativement voisine
de l'ancêtre commun supposé… Les nombreuses contradictions qui surgissent de tels hypothétiques modèles
provoquent de façon évidente un désarroi grandissant chez les scientifiques spécialisés dans la recherche des
origines de l'homme. Ainsi, 'Lucy' ( Al. 288 ), l'Australopithecus afarensis de 3 millions
d'années, apparaît de plus en plus comme une créature 'composite'. Si son crâne était simien d'aspect, il était
néanmoins nettement plus arrondi que les premières reconstitutions de Don JOHANSON le laissaient supposer.
Si elle utilisait habituellement la locomotion bipède pour progresser, elle grimpait facilement aux arbres grâce à ses
genoux aux attaches souples et à son articulation omoplate-humérus nettement articulée vers le haut. Les phalanges
des mains et des pieds étaient courbes comme celles de singes arboricoles, et le gros orteil était pratiquement en opposition
avec les autres orteils. On se demande finalement comment l'Australopithèque des Afars a fait pour 'acquérir' une
bipédie fonctionnelle… C'est bien là plutôt une preuve que cette disposition locomotrice de la bipédie était déjà en place,
dès l'origine de la lignée des Australopithèques, et rendue possible par l'architecture squelettique toute entière, ainsi
que par les performances motrices du cerveau.
Ce qui est le plus choquant pour les partisans inconditionnels d'une évolution 'allant du singe
à l'homme', c'est que 'Lucy' avait toujours un bassin de type plutôt humain, et surtout
qu'elle accouchait comme une femme d'aujourd'hui ( BERGE et al. 1984 ), c'est-à-dire aussi
avec tous les risques que cela comportait pour mère et petit ! Dans l'optique classique, qui fait descendre le
pré-australopithèque de l'arbre pour lui faire arpenter, à peine redressé sur 2 jambes, la savane… on se serait plutôt
attendu à ce que le bassin de 'Lucy', ou tout au moins son excavation pelvienne, fut à peu près du même type que celui
d'un Grand Singe actuel !
Le caractère d'une bipédie, non pas 'en cours d'acquisition', mais plutôt 'ancienne', doit en effet être
associé à un bassin de type australopithécien. Sans être tout à fait semblable à ce lui d'une femme, le bassin de 'Lucy'
montre incontestablement la même structure liée à la station verticale et à une pratique ancienne de la bipédie, au sein
de la lignée. Le nouveau-né d'australopithèque était contraint lors de la partirution, comme un bébé humain,
de passer obliquement à travers les parois pelviennes maternelles afin de mettre le plus petit diamètre de la tête fœtale
en rapport avec le plus grand diamètre du bassin [ pour cela, flexion et rotation de la tête du nouveau-né
sont nécessaires ]. Les petits australopithèques ont ainsi dû venir au monde avec des têtes plus grosses
que communément admis avant l'étude du bassin de 'Lucy' ou de celui reconstitué à partir d'éléments fossiles trouvés
à Sterkfontein [ STS 14, espèce africanus ]. Cela rappelle les travaux du professeur en
obstétrique hollandais Klaas de SNOO ( 1937, 1942 ), pour lequel le mode de parturition humain
a permis et favorisé le maintien d'un bipédisme initial tout au long de l'histoire évolutive de l'homme, en liaison
avec le caractère également originel du gros cerveau.
Cette disposition du bassin de type bipède chez les Australopithèques, associée à d'autres traits
anatomiques dénotant une tendance évolutive acquise vers le quadrupédisme… constitue l'une des meilleures preuves,
s'il s'en faut, que les Australopithèques ont jadis procédé d'humains véritables ! Il n'est pas étonnant,
non plus, de constater que les espèces A. afarensis et A. africanus, dites 'graciles' se rapprochent plus
de l'homme, alors qu'A. robustus présente notamment un élargissement de l'aile iliaque, spécialisation qui rappelle
ce qu'on observe chez les Grands Singes.
D'un point de vue phylogénétique, reflétant l'évolution au sein même du groupe des
australopithèques, il est possible, mais non certain, que les différentes formes connues d'australopithèques
ont dérivé les unes des autres, l'australopithèque robuste représentant une ultime étape vers le Singe
anthropomorphe. Mais compte tenu des longues périodes de temps prises en considération et de l'état fragmentaire
de notre connaissance des fossiles d'hominiens de type australopithécoïde, il paraît plus logique d'affirmer qu'il y a eu
émergence consécutive, en Afrique ou ailleurs, de nombreuses lignées de type australopithécoïde
à partir de la souche humaine, avec dans chacun des cas une évolution séparée possible vers le type
simien quadrupède et arboricole. Ainsi, les ressemblances constatées entre les différentes espèces
connues ( A. afarensis représentant déjà un amalgame fort hétéroclite ) résulteraient plutôt de
convergences de formes, par adaptation à un environnement similaire ( celui de la savane boisée ).
L'Afrique héberge sans doute encore, au Zaïre ou au Kenya ( HEUVELMANS 1980,
ROUMEGUERE-EBERHARDT 1990 ), à l'intérieur de ses grandes forêts ou à la lisière de celles-ci,
divers primates de type australopithécien. La survivance jusqu'à nos jours de telles formes ( qui peuvent procéder
par filiation directe des australopithèques anciens, mais sont vraisemblablement d'émergence plus récente )
n'aurait en fait rien d'extraordinaire. Ainsi, le paléontologue français Yves COPPENS a découvert en 1960 à Koro-Toro
au Tchad la partie faciale d'un petit crâne australopithécoïde aux mâchoires assez proéminentes qu'il décrivit
sous le nom de Tchadanthropus uxoris. On lui accordait alors un âge de 600.000 ans, mais ce chiffre
a été très sensiblement révisé à la baisse ( 8.000 ans ) !
FIN DE LA PREMIERE PARTIE
Dans le numéro 7 ( sept. 1991 ) de BIPEDIA, nous aborderons le vaste
sujet des hominiens fossiles ou contemporains, anatomiquement très voisins de l'homme, et reviendrons, bien sûr,
sur le phénomène évolutif de la déshominisation.
De cette première partie, nous retiendrons aujourd'hui l'idée de base que la situation faunique
actuelle des Primates ( y incluant l'homme et la diversité des formes contemporaines répertoriées dans le cadre
de la recherche cryptozoologique ) correspond à un état qui a toujours prévalu au cours des derniers millions
d'années écoulées [ pour se limiter à la période pour laquelle nous possédons le plus grand nombre de fossiles de référence ].
Ainsi ont cohabité et cohabitent peut-être encore : la forme Homo ( type
de l'homme moderne à bipédie parfaite et crâne arrondi ), divers hyperanthropoïdes en voie de déshominisation,
des australopithécoïdes en transition vers la quadrupédie, ainsi que des anthropomorphes quadrupèdes ( à bipédie
résiduelle ) de type simien, ou à option évolutive non axée sur l'arboricolisme… Cette liste se complète,
bien évidemment, par la foison des autres formes mammaliennes ou post-mammaliennes.
BIBLIOGRAPHIE
Cet exposé a été écrit en 1990. Depuis cette date, de nombreuses découvertes d'australopithécoïdes
se sont succédées, tant en Afrique orientale et méridionale qu'au Tchad. Au sujet de l'Ameranthropoides loysi,
évoqué à la fin du paragraphe des Singes Anthropomorphes, il est intéressant de se reporter à l'étude de Michel Raynal :
http://www.interciencia.org/v24_04/viloria.pdf
ou à son article paru dans la "La Gazette Fortéenne" ( tome 1, 2002 ).
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par François de SARRE
FOREWORD : The text presented below is the second part of a lecture which was given by the author in September 1989 in Nice ( France ), during a convention organized by the UTP ( Université du Temps Présent ). The exposé which follows provides a clear and concise résumé of the essentials of the Initial Bipedalism Theory.
Nous allons maintenant passer au point suivant qui sera traité dans cette conférence : il
concernera l'histoire évolutive des Vertébrés, qu'on appelle en Zoologie la phylogénie.
Nous avons vu durant la première partie que l'embryon de chaque vertébré porte en lui tous les
caractères d'un bipède à gros cerveau. Les formes embryonnaires attestent que ces animaux sont jadis passés
par le stade d'une organisation anatomique bien supérieure [ de notre point de vue anthropomorphique ]
à celle qu'atteindra l'animal adulte. Et pourtant, tous les schémas phylogéniques 'classiques' présupposent que le Vertébré
original était une sorte de "ver marin", auquel allait bientôt pousser, comme par enchantement, d'abord une vraie tête,
puis des nageoires, et enfin des pattes…
Les spécialistes de l'évolution partent en effet du parti pris qui consiste à placer
arbitrairement l'homme au sommet de la hiérarchie du Vivant, avec les singes et les autres mammifères
juste en dessous de lui, et plus bas les vertébrés dits 'inférieurs'.
Un autre parti pris est d'affirmer que la forme humaine est un aboutissement, un 'point final',
alors que zoologiquement parlant, l'homme est plutôt caractérisé par sa non-spécialisation anatomique,
ce qui fait de lui ipso facto le point de départ rêvé pour de nouvelles séries évolutives…
Je pourrais aussi parler de l'importance exagérée que l'on accorde actuellement aux fossiles,
ces vestiges d'animaux anciens ou de plantes que l'on retrouve dans le sous-sol. D'une part, il ne faut jamais perdre de vue
que la fossilisation d'un être vivant demeure un phénomène fortuit, d'exception, et que notre vision qualitative et
quantitative des formes de vie anciennes est, par définition, tronquée, car nous ne retrouvons pas, loin de là, l'ensemble
des créatures qui ont vraiment vécu dans le passé à une époque donnée. Et d'autre part, les paléontologues ne se contentent pas,
ce qui ne serait déjà pas si mal, de décrire les espèces animales disparues ( la plupart du temps, des fragments
ou de simples dents ! ), mais essayent avec ces maigres moyens de leur trouver une généalogie vraisemblable,
et c'est là que, très souvent, ils débordent littéralement d'imagination et tissent, par exemple, des liens de filiation
imaginaires entre des animaux qui ont simplement possédé, à quelques millions d'années de distance dans le temps,
une apparence voisine !
L'origine réelle des animaux à structure vertébrale, les Vertébrés, demeure aussi, pour les
chercheurs concernés, l'objet de controverses nombreuses, car on n'a finalement découvert que bien peu de témoignages fossiles
significatifs. Tout ce que l'on peut affirmer, c'est que des animaux ressemblant à des poissons, les Agnathes ostracodermes
sans mâchoire, ont vécu dans les mers de l'Ordovicien, c'est-à-dire il y a environ 450 millions d'années [ selon les
calculs des géologues ]. Il ne nous étonnera pas d'apprendre qu'il s'agissait de formes à cuirasse ou à carapace, vivant
des lagunes sablonneuses, ce qui explique leur fossilisation et leur préservation !
Il faut vraiment beaucoup de mauvaise volonté pour considérer, comme le font actuellement les
évolutionnistes d'école, qu'il s'agit là des tout premiers vertébrés qui aient jamais vécu. L'allure seule des ces 'ichtyoïdes'
peut être qualifiée de 'primitive', mais, bien sûr, cela s'accorde trop bien avec le schéma darwinien classique, qui voit les ancêtres
des Vertébrés comme des vers marins, et les 'poissons sans mâchoire' leur paraissent logiquement être l'un des jalons
suivants de l'évolution, en route vers les tétrapodes, c'est-à-dire les animaux vertébrés à 4 pattes, avec, en bout
de course, l'homme bipède…
Quelques dizaines de millions d'années plus tard, au Dévonien, on retrouve dans des couches
sédimentaires d'origine marine et lacustre, des poissons d'allure tout à fait moderne, ainsi que certaines espèces
qui étaient adaptées à la fois aux deux éléments : aquatique et terrestre. Si les paléontologues ont raison, il faut
convenir que l'évolution a progressé tout d'un coup à vitesse hautement accélérée ; ou alors, comme je le suppose,
l'ordre chronologique que nous présupposons à l'heure actuelle n'est dû qu'au simple hasard des fouilles,
et au fait que les Agnathes cuirassés que l'on connaît de l'Ordovicien se sont conservés en bon état dans les couches
sédimentaires anciennes où on les a retrouvés, ce qui ne fut pas le cas des véritables poissons, leurs contemporains !
Parmi ceux-ci, découverts dans des strates un peu plus anciennes, les plus intéressants
sont à juste titre les Sarcoptérygiens. On regroupe sous cette désignation les Crossoptérygiens ( avec le fameux
cœlacanthe, toujours vivant ), et les Dipneustes ou poissons pulmonés. Ces formes connues par des fossiles
dès le Dévonien possédaient un poumon et des narines internes leur permettant de respirer l'air atmosphérique
sans avoir à ouvrir la bouche [ comme le ferait un crocodile ]. Ce sont des traits qu'ils partagent
avec les vertébrés tétrapodes. Sous le climat chaud du Dévonien, il était en effet intéressant pour un poisson de
conserver la faculté de respirer de l'air atmosphérique, car les branchies ( nouvellement acquises ) ne suffisaient
pas toujours à extraire de l'eau l'oxygène nécessaire au bon fonctionnement de leur organisme. On sait que la quantité de
gaz susceptible de se dissoudre dans l'eau est fonction de la température de celle-ci. Il n'est donc pas étonnant que lacs
et rivières de cette époque géologique aient été peuplés de poissons qui avaient gardé la faculté de respirer de l'air
atmosphérique, ce qui devenait superflu, bien sûr, quand il s'agissait de poissons en eau libre dans l'océan ; le poumon
originel pouvait dès lors adopter la fonction d'une vessie natatoire, telle que nous la connaissons chez la majorité
des poissons actuels.
Ainsi, je pense que les Crossoptérygiens fossiles, comme Eusthenopteron, apparenté
au cœlacanthe actuel, loin d'être les ancêtres des tétrapodes terrestres, étaient plutôt issus eux-mêmes d'amphibiens
quadrupèdes, pouvant ressembler à Ichthyostega. Les nageoires paires d'Eusthenopteron possédaient
des éléments que l'on retrouve chez les tétrapodes. En revanche, chez les poissons plus 'évolués' et mieux adaptés à la nage
en eau libre, on découvre une disposition dérivée de ces nageoires paires, où les rayons s'articulent désormais directement
sur les ceintures pectorale ou pelvienne qui les rattachent au tronc.
Les Poissons descendent donc logiquement des tétrapodes terrestres, qui à partir de
stades amphibies, sont retournés à l'eau vers le début de l'ère Primaire, et aussi sans doute un peu plus tard pour
certaines lignées, tout comme l'ont fait également des reptiles marins, tel l'Ichtyosaure, ou les Cétacés,
qui sont des mammifères…
La question qui est restée en suspens au cours des derniers minutes de cet exposé, est de
savoir lequel a été effectivement le premier vertébré à fouler le sol de la Terre, puisque nous avons compris
que les poissons n'étaient pas en cause. Déjà, d'un seul point de vue anatomique, il est assez ridicule d'affirmer
qu'un poisson, même "pré-adapté" par ce que certains naturalistes appellent une 'marche sur le fond de l'eau', ait pu
un jour se hisser hors de son élément natal, campé sur de fragiles nageoires. Mais en plus du problème purement
anatomique, on oublie aussi le facteur psychique, c'est-à-dire dans ce contexte, la forme de motivation qu'a bien dû posséder
cette créature qui osa se lancer dans la conquête des terres fermes, pourtant si inhospitalières ; et on oublie que
cette créature a dû, dès l'origine, se trouver en possession d'un système nerveux performant [ rien à voir avec
une cervelle de poisson ! ], apte à résoudre les problèmes nouveaux posés par cet environnement terrestre,
inhabituel et hostile.
Il faut là s'imaginer un être encore non-spécialisé ( tout à la différence d'un
poisson ! ) et doué d'une très grande plasticité anatomique, laquelle pouvait évoluer sur la terre ferme vers
une relative stabilité corporelle, préservée chez l'homme grâce au haut psychisme, mais également tout apte
à donner naissance, par voie de spécialisation, à de nouveaux états du monde animal, et ce à partir de la morphologie
bipède originelle !
Il faut en outre tenir compte des données fournies par l'Embryologie [ que nous avons
évoquées dans la première partie de cet exposé ]. J'en suis ainsi venu, voici quelques années, à formuler mon
hypothèse de l'homoncule marin, qui était en quelque sorte le pré-hominidé ancestral, duquel
descendent tous les vertébrés connus : récents ou fossiles.
Représentons-nous, dans les mers du Précambrien [ il y a environ 700 millions
d'années, selon le décompte officiel de la Paléontologie ], une créature d'aspect médusoïde vivant dans l'océan
qui recouvrait alors l'ensemble de la planète. Les conditions de vie dans un tel milieu ont pu amener la formation d'un organe
de flottaison ou de sustentation, en ce sens qu'une sphère creuse se développait au niveau du
pôle apical de l'organisme, donc dans sa partie supérieure. C'est le même type de circonstance qui prédispose
à la formation de l'ombrelle des méduses, à partir d'une larve ovoïde de type 'planula', qui nage librement à l'aide
de cils épidermiques, avant de développer une cloche natatoire. C'est une glande ( peut-être celle qui devait
devenir la glande pinéale ) qui allait produire le gaz nécessaire au gonflement de la vésicule
assurant la flottaison en position verticale du futur vertébré. Cette créature aquatique pouvait aussi se mouvoir latéralement
à l'aide de 2 paires de palettes natatoires, tandis qu'une petite queue avait surtout des fonctions stabilisatrices.
L'homoncule marin respirait sous l'eau à l'aide de fentes branchiales sises au niveau du cou. Nous retrouvons ici
bien sûr les fameuses fentes branchiales dont on explique communément la présence sur l'embryon humain en
se référant à un stade supposé de 'poisson' dans le passé de notre espèce… Mais il s'agit en fait de l'empreinte laissée
par la phase aquatique ancienne que nous venons de décrire. Les ébauches de membres chez l'embryon humain,
homologues des nageoires de poissons ( mais de conception bien antérieure ! ), rappellent la
disposition qui existait chez le pré-vertébré ancestral. Le repli natatoire était primitivement continu, le long du corps,
s'étendant de part et d'autre des flancs, puis la partie moyenne disparut, formant à l'avant la paire de palettes antérieures
et la ceinture pectorale, et à l'arrière la paire de palettes postérieures et la ceinture pelvienne.
Le cerveau du futur Vertébré est ainsi à l'origine un organe de flottaison, créé par le
remplissage d'une poche ectodermale, d'abord par du gaz, puis par des cellules nerveuses
migrant à partir du tube neural, qui constituait alors le système nerveux originel de cette créature
marine acéphale, une sorte de ver à chorde dorsale, en quelque sorte.
J'explique ainsi, avant tout, la rondeur du crâne des premiers Vertébrés,
conservée par l'homme. C'est à ce moment de notre ontogénie, et à ce moment seul, qu'une telle
forme globulaire a pu s'épanouir au sommet d'une colonne vertébrale, maintenue droite, dans l'eau.
C'est dans le milieu aquatique d'origine qu'une sphéricité originelle du cerveau des vertébrés, et, par voie de conséquence,
de la boîte osseuse qui le protège, est admise pour des raisons purement mécaniques… Là où une partie du
corps peut se développer librement, comme dans l'eau, sans devoir tenir compte de parties adjacentes susceptibles
de la gêner, elle prend spontanément la forme qui permet le maximum d'épanouissement, au point de vue fonctionnel,
pour le minimum de place, soit le volume le plus grand pour la moindre surface : c'est, en l'occurrence, la forme sphérique.
Cette disposition anatomique ancienne est donc à l'origine de la rondeur actuelle
du crâne humain [ Homo sapiens ], et ce caractère plésiomorphe est évidemment encore
plus présent chez le fœtus qui baigne en milieux aqueux. Embryologiquement, le cerveau précède le crâne :
il n'y a donc pas primauté du 'contenu' sur le 'contenant', contrairement à ce que veulent bien penser les paléontologues
qui n'éprouvent aucune gêne à faire 'se gonfler' un crâne d'australopithèque afin d'en faire un crâne d'humain de type sapiens !
Ce qui s'est réellement passé, au niveau de la formation de la calotte crânienne,
c'est qu'une membrane mésodermale, préludant l'ossification du crâne, est venue s'intercaler entre le cerveau
globulaire primitif et l'épiderme [ tous deux d'origine ectodermale ]. Le mésoderme est issu du feuillet moyen
qui apparaît lors du stade de la 'gastrula', et est préposé notamment à l'élaboration du squelette.
Cette poussée osseuse autour de, et en dessous de, la 'bulle' constituée par le cerveau primitif va être à l'origine
de la flexion de la chorde dorsale dont nous avons déjà parlé : elle forme le plancher crânien et
consacre la forme debout de l'homme, car cette flexion maintient chez ce dernier la disposition
anatomique originelle de l'homoncule qui se déplaçait surtout dans l'eau en position verticale.
On comprend ici fort bien que les caractères spécifiques de l'être humain : tête ronde,
gros cerveau, verticalité fonctionnelle du corps… n'ont pu se mettre en place qu'à ce moment précis de l'histoire
évolutive des Primates et des Vertébrés en général … c'est-à-dire durant la phase aquatique qui fut celle
de l'homoncule marin, avant la sortie définitive des eaux. La possibilité donnée aux cellules nerveuses, en provenance
de la moelle épinière, de migrer vers le pôle supérieur de l'homoncule, emplacement de la future tête,
puis de s'y multiplier en prenant toute la place disponible [ sous la protection de la boîte crânienne
ossifiée ], a amplement suffi, il y a fort longtemps, à façonner un être hors du commun…
le premier véritable vertébré, qui, lors de l'étape évolutive suivante, allait pouvoir se lancer à la conquête
des terres émergées !
Un point important à noter encore ici est celui de l'antériorité du système
nerveux spinal [ et de systèmes autonomes, comme celui du cœur ] sur le système
nerveux céphalique, puisque le cerveau s'est développé postérieurement, à partir de ce qui fut d'abord un organe
de flottaison ! Expliquons-nous : avant d'acquérir un cerveau 'apical' fonctionnel, l'homoncule marin a bien
dû disposer d'un ensemble nerveux apte à assurer chez lui les fonctions essentielles de transmission
des informations ( les nerfs ) et de commande des réactions induites par le milieu extérieur
( les neurones ). Il faut concevoir que cette créature aquatique pré-humaine concentrait ailleurs que dans
sa tête l'essentiel de ses commandes motrices et sensorielles… Dans la logique de la théorie que je préconise, c'est
chez l'homme, resté anatomiquement le plus proche du type originel, que l'on doit au mieux retrouver les 'traces'
d'un tel système nerveux primaire, non pas relié implicitement au cerveau, mais plutôt à la moelle épinière !
J'ai ainsi pensé aux 'méridiens' d'acupuncture : ils représenteraient à mon avis les trajets plus ou moins
évanouis des anciens nerfs de l'homoncule marin, antérieurs à la formation du cerveau et à sa mise en fonction,
qui aboutissaient tous au niveau de la moelle épinière, long de la colonne dorsale, tout comme certaines grosses
fibres résiduelles, toujours présentes et histologiquement visibles dans l'organisme humain, qui ne possèdent
plus de connections avec les centres nerveux supérieurs du cerveau.
Le pas décisif dans la conquête de la terre ferme à partir de la mer primordiale s'est sans
doute déroulé, voici près de 600 millions d'années, quand le sol commença à émerger. L'homoncule terrestre,
qu'on peut déjà qualifier d'homme archaïque, était, nous l'avons souligné, une créature à tendance exploratrice innée,
dotée d'un système nerveux performant. Il disposait de l'adaptation physique - marche bipède, mains libres,
respiration aérienne, régulation thermique, organes digestifs et reproducteurs - permettant d'atteindre, de saisir
et de manger les plantes qu'il trouvait sur son chemin, ainsi que les animalcules qui vivaient tout autour. La station verticale
avait été acquise avant la sortie des eaux ; les différentes modifications adaptatives du squelette, notamment
au niveau des pieds, résultèrent des contraintes imposées par le milieu et de la prise de conscience d'habitudes nouvelles.
Bien entendu, il s'agit là d'une étape décisive dans ce qu'il est convenu d'appeler l'hominisation !
Ce stade vit la conception du type originel des Mammifères placentaire, la confirmation
de la locomotion bipède ( adaptée au port de tête ) et l'achèvement de la forme humaine. La colonne vertébrale
se creuse au niveau des reins ( lordose lombaire ), afin de conférer à la charpente toute entière un meilleur
soutien en position bipède permanente, dans un milieu où la poussée d'Archimède n'intervenait plus. A hauteur de la nuque,
une concavité d'acquisition un peu plus ancienne ( lordose cervicale ), née lors de l'extension de la
partie faciale du crâne chez l'homoncule marin, assure à la tige vertébrale son rôle de soutien mobile pour la tête…
De cette époque de transition entre vie aquatique, semi-aquatique et terrestre, datent aussi la consolidation définitive du bassin,
dans sa forme actuelle ( avec le fémur, bien ancré dans son articulation ), et la formation d'un pied plantigrade,
nous le disions, constituant une base de sustentation idéale pour une colonne vertébrale bien droite, en aplomb
sur des jambes rectilignes et convenablement musclées !
L'homoncule terrestre présentait l'innovation importante de concevoir et de mettre au monde
un petit vivant ( caractère de la viviparité ). Avant la naissance, l'enfant grandit et se développe
dans l'utérus maternel. Le placenta est l'organe qui l'alimente et le libère de ses déchets à travers le cordon
ombilical, tandis que l'amnios est la cavité remplie de liquide, sorte de 'petit aquarium portatif ', où flotte le fœtus,
qui poursuit là son existence aquatique ( réminiscence d'un trait ancestral ! ) jusqu'à la parturition.
Une disposition dérivée est celle de l'œuf des oiseaux, des reptiles et de quelques mammifères. L'embryon,
qui a toujours besoin de grandir dans l'eau, est entouré du même amnios, et tire sa nourriture du sac vitellin,
très riche en substances nutritives, tandis qu'il respire à l'aide de l'allantoïde [ qui recueille aussi les rejets
des organes rénaux ], toutes ces structures restant à l'abri dans la coquille de l'œuf. Chez les amphibiens
et les poissons, l'amnios, devenant superflu pour un animal revenant ou revenu à la vie aquatique, disparaît.
L'homoncule terrestre devra donc à sa viviparité, lui assurant un bon taux de reproduction,
mais assurant aussi la croissance jusqu'à terme du gros cerveau globulaire… l'affranchissement définitif de toute
contingence aquatique. Un autre caractère primaire était aussi celui de l'homéothermie, donc de la régulation
thermique du corps. En effet, en milieu aérien, contrairement à ce qui se passe dans l'océan, les écarts de température
sont souvent brusques et très importants. La thermorégulation a été rendue possible et nécessaire par le développement
structurel du cerveau. Eviter le dessèchement du corps était également primordial pour l'homoncule sortant des eaux,
et la peau du premier vertébré terrestre, tout en demeurant souple, dut se revêtir d'une pellicule extérieure cornée
qui limitait les déperditions d'eau. Les glandes sudoripares dans la peau intervenaient néanmoins en cas d'excès
de chaleur, produisant la sueur qui, en s'évaporant, rafraîchissait tout le corps…
Le développement des dents, dans une mâchoire hémisphérique, permettant la mastication
et une digestion rapide, n'est pas sans rapport avec l'acquisition de l'homéothermie, qui nécessite un grand besoin
en énergie, apportée par l'alimentation. L'apparition de poils isolants, de type humain [ comme ceux que
nous avons toujours ], est également liée aux exigences de la thermorégulation.
Ce stade homonculien vit ainsi l'achèvement de la forme humaine, et l'homme dit 'moderne'
ne s'est guère modifié anatomiquement depuis… En ce sens, il est bien un vertébré ancestral. Nous descendons
en droite ligne de l'homoncule précambrien !
Comment sont maintenant apparus les autres vertébrés, tels que nous les connaissons,
à travers les fossiles des ères géologiques passées ou sous la forme des représentants de la faune actuelle ?
Il s'agit là de l'expression même du processus évolutif global que nous appelons déshominisation. En poursuivant leur
évolution structurelle au-delà du 'bautypus' homonculien, désigné comme point d'achèvement de la forme humaine,
divers types de créatures mammaliennes pouvaient dès lors surgir : l'homme n'était plus seul !
La tendance évolutive déshominisante marque simplement un éloignement par rapport
aux caractéristiques humaines originelles. A partir de notre morphologie, caractérisée non seulement par la station érigée,
mais aussi par la rondeur du crâne, vont se développer de nombreuses structures dérivées…
Les créatures déshominisées progressent anatomiquement dans le sens de leur adaptation à des conditions
de vie nouvelles : le choix de la nourriture [ spécialisation alimentaire ] module pour chaque lignée
naissante un type de denture adapté à une meilleure mastication. Conjointement, les mâchoires deviennent plus puissantes,
plus lourdes ou plus longues, ce qui entraîne de profondes modifications au niveau du squelette crânien, et la perte
de la rondeur de tête originelle ! Des points d'attache plus saillants [ formant des crêtes osseuses ]
se mettent en place pour les muscles ; la poussée des mâchoires vers l'avant est compensée par celle
du crâne vers l'arrière, lequel comprime le cerveau. L'attitude devient de plus en plus penchée vers l'avant,
tandis que les membres antérieurs acquièrent peu à peu une fonction locomotrice active, ce qui renvoie la compétence
de la main vers la bouche ou le museau. La déshominisation de l'être ne peut alors plus que s'accentuer…
C'est à son environnement socio-culturel que l'homme [ d'hier et d'aujourd'hui ]
doit de préserver son identité biologique. Si l'hominisation a été rendue possible par la possession d'un gros cerveau
et celle d'un haut degré de psychisme, au sein de sociétés élaborées, l'évolution déshominisante et ses conséquences
physiques résultent de facteurs perturbateurs, par exemple lorsqu'une population se retrouve coupée de ses racines
culturelles, et qu'elle est confrontée à des conditions de survie difficiles. Des groupes isolés ne sauront assurer leur
survivance qu'au prix de la perte de leur identité humaine… ce qui entraîne inéluctablement au bout de quelques
générations l'apparition de spécialisations aberrantes. La bipédie, tant qu'elle reste acquise, garantit pour des raisons
psycho-mécaniques un certain degré de développement mental du cerveau, comme par exemple chez les australopithèques
de la fin de l'ère Tertiaire… Mais les modifications crâniennes, et la baisse du potentiel psychique, rendent la démarche
bipède de moins en moins bien assurée. Si l'animal, à ce moment, n'opte pas pour l'arboricolisme ou un habitat
semi-aquatique, une solution peut résider dans l'appui sur une queue. Mais souvent, c'est une locomotion franchement
quadrupède qui est adoptée.
Ainsi, la première étape dans l'évolution déshominisante, quelles que soient les circonstances
et l'époque géologique où se situe l'événement, est constituée par l'émergence de formes
hyperanthropoïdes [ c'est-à-dire, ultra-humaines, semblables aux hominiens préhistoriques au crâne réduit
et allongé, dont on connaît bien les reconstitutions dans les musées ! ]. Diverses lignées peuvent émerger,
dont l'apparence physique est largement modulée par les conditions de milieu ( et l'alimentation ).
L'évolution déshominisante peut alors se poursuivre vers une simplification toujours plus poussée de l'organisme,
et la perte de caractères mammaliens, comme la viviparité placentaire ou l'homéothermie.
On peut appeler ce processus : reptilisation.
Pour les distinguer des mammifères connus ( récents ou fossiles ),
j'appellerai ici mammaliens les animaux quadrupèdes ( ou à bipédie 'résiduelle' ) qui évoluèrent jadis
à partir du prototype humain. Ces animaux présentaient toujours l'aptitude de mouvoir leur corps dans le plan vertical,
principalement, quand ils marchaient à 4 pattes [ c'est le mode de locomotion des félins ou des ruminants,
par exemple ]. A partir de là, 3 grandes options s'offrent à ces créatures : elles sont toutes attestées
par des fossiles ponctuels [ à une époque géologique donnée ], mais il convient aussi de généraliser le phénomène
à l'ensemble des périodes passées. Quand des mammaliens gardent l'essentiel des caractères de la Classe,
et notamment l'articulation maxillaire typique, leurs restes seront reconnus par les paléontologues comme étant
ceux de mammifères. Mais d'autres formes mammaliennes contemporaines ont pu, tout en conservant l'aptitude
d'onduler leur corps dans un plan vertical, transformer radicalement leurs mâchoires et leur denture, ce qui a conduit
à l'émergence des formes aviennes et dinosauriennes… Enfin, troisième possibilité, l'animal adopte un type nouveau
de locomotion qui consiste à tordre latéralement la colonne vertébrale, avec balancement concomitant de la tête
et de la queue : il s'agit des 'proto-reptiles', largement représentés dans les couches sédimentaires
du Permien et appelés 'reptiles mammaliens' par les paléontologues, ou encore les crocodiles… Tous les proto-reptiles,
en développant la locomotion par reptation, perdent progressivement les attributs mammaliens
qui leur restent [ dents différenciées, pelage, régulation thermique, etc. ]. Le squelette se transforme
profondément, et les membres viennent se placer latéralement de part et d'autre des flancs : nous arrivons ainsi
au type reptilien, et l'animal ne glisse pour ainsi dire plus que sur le ventre… Cela peut même mener à la perte
des membres [ serpents ], ou après un retour dans l'eau, à leur transformation progressive
en nageoires paires de poissons… suite à un stade intermédiaire amphibien aux larves aquatiques.
Tous les grands groupes de vertébrés sont attestés dans les documents fossiles
de l'ère Secondaire. Ce n'est pas encore le cas pour l'ère Primaire, et cela s'explique sans doute par le fait que le nombre
de dépôts sédimentaires susceptibles de nous donner des informations conséquentes sur les faunes d'alors
décroît en fonction directe de l'éloignement temporelle… Reste encore, et ce sera le mot de la fin, à découvrir
dans tous ces sédiments des vestiges humains datables, ou les traces d'activité humaine, pour confirmer
la théorie de la bipédie initiale sur le terrain !
[ Fin de la conférence, Septembre 1989 à Nice ]
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by Ulrich MAGIN
While reading one of my favourite works of literature, Charles FORT's WILD TALENTS ( 1932 ), I came across the following reference [ Charles FORT : The Complete Books, New York, Dover, 1974, p. 966 ] which nicely sums up the idea of initial bipedalism, though not without the proverbial grain of salt :
<< I now have a theory that, of themselves, men never did evolve from lower animals : but that, in early and plastic times, a human being from somewhere else appeared upon this earth, and that many kinds of animals took him for a model, and rutely and grotesquely imitated his appearance, so that, today, though the gorillas of the Congo, and of Chicago, are only caricatures, some of the rest of us are somewhat passable imitations of human beings >>.
FORT did not go as far as actually believing that this was the truth ( he said he never believed anything of him he had ever written ), yet this quote shows that even his small ironical comments may contain valuable insights.
FORT, however, is hardly the authority one would use to impress skeptical scientists, so I am referring to his thoughts only to point out a further 'father' of the theory.
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FIN
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